Le trop-perçu de rémunération en droit fonction publique
Lorsque le fonctionnaire ou l’agent public contractuel perçoit des sommes plus importantes que celles qu’il a le droit de percevoir, la différence entre ces sommes est qualifiée « d’indu ».
En droit du travail, lorsque le salarié bénéficie d’un trop-perçu versé au salaire, l’employeur peut lui en demander le remboursement.
Est-ce le cas en droit de la fonction publique ?
OUI : Il est possible que le fonctionnaire ou l’agent public contractuel bénéficie d’un trop-perçu de rémunération.
Or, l’article L711-6 du code général de la fonction publique est parfaitement clair quant au remboursement des sommes indument perçues :
« Les sommes indument perçues par un agent public en matière de rémunération donnent lieu à remboursement (…) »
Le remboursement des sommes indument perçues par un agent public n’étant pas sans conséquences, sa mise en œuvre est encadrée par plusieurs conditions.
Dans quels cas les fonctionnaires et agents publics contractuels sont concernés par un trop-perçu ?
Les agents publics peuvent être bénéficiaires d’un trop-perçu de rémunération dans les cas suivants :
- Traitement : l’agent a été rémunéré sur la base d’un indice supérieur à celui auquel il avait droit, a perçu un traitement correspondant à un temps plein alors qu’il travaillait à temps partiel ou était à demi-traitement du fait d’un congé maladie, a bénéficié d’une rémunération en l’absence de service fait, a continué à être rémunéré alors qu’il était radié des cadres ;
- Indemnité de résidence et supplément familial de traitement (SFT) : l’agent peut avoir perçu un SFT alors que son conjoint agent public le percevait ou que l’âge de ses enfants n’ouvrait plus ce droit ; il a pu bénéficier d’une indemnité de résidence au taux de Paris alors qu’il était affecté dans une commune n’y ouvrant pas droit ;
- Primes et nouvelle bonification indiciaire (NBI) : l’agent percevait une NBI alors que les fonctions qu’il occupait ne lui ouvraient pas ou plus ce droit ; des primes ont été versées sans base réglementaire ou alors que l’agent ne remplissait pas ou plus les conditions ;
- Remboursement des frais et rémunération accessoire : prise en charge partielle du prix des titres d’abonnement correspondant aux déplacements effectués entre la résidence habituelle et le lieu de travail, frais de missions, activités de formation et de recrutement, etc.
Tous les indus peuvent-ils faire l’objet d’un remboursement ?
NON : Lorsque le paiement d’une somme résulte d’une décision prise par l’administration en application d’une disposition réglementaire qui a été annulée par le juge administratif, l’employeur public ne peut pas demander le remboursement.[1]
Dans quel délai le remboursement est-il exigible ?
L’employeur public ne peut pas demander indéfiniment le remboursement de sommes indument perçues par le fonctionnaire ou l’agent public contractuel.
Ainsi, en matière de rémunération des agents publics, l’employeur public ne peut demander le remboursement des sommes indument perçues que dans un délai de 2 ans.
Ce délai de 2 ans commence à courir à compter du premier jour du mois suivant le mois de mise en paiement de l’indu[2].
Le délai de 2 ans est-il toujours applicable ? Si NON, quel est le délai applicable ?
NON : Dans ces certains cas, le délai de 2 ans n’est pas applicable.
C’est notamment le cas lorsque l’indu résulte :
- D’une absence d’information de l’administration, par un fonctionnaire ou un agent public contractuel, de modifications de sa situation personnelle ou familiale susceptibles d’avoir une incidence sur le montant de sa rémunération ;
- De la transmission à l’administration, par un fonctionnaire ou un agent public contractuel, d’informations inexactes sur sa situation personnelle ou familiale ;
Dans ces cas de figure précités, qui n’ont d’ailleurs pas pour origine une erreur de l’administration susceptible d’entraîner la responsabilité de cette dernière, c’est le délai de prescription de droit commun qui trouve à s’appliquer : un délai de 5 ans[3].
Comment l’employeur public demande-t-il le remboursement ?
Si l’administration entend demander le remboursement des sommes indument perçues, elle doit émettre un titre de recette avant l’expiration du délai de 2 ans ou de 5 ans exposés ci-dessus.
Le titre doit comporter certaines mentions pour être régulier :
- La nature de la rémunération qui aurait été indument versée ;
- Les références justifiant la demande de remboursement ;
- Le montant de l’indu dont le remboursement est demandé.
Sans titre de recette, l’administration ne peut pas obtenir le remboursement du trop-perçu.
Comment l’employeur public obtient-il le remboursement ?
Une fois le titre de recette émis, il doit être notifié au fonctionnaire ou à l’agent public contractuel auquel le remboursement des sommes indument perçues est demandé, accompagné d’un avis des sommes à payer.
Si l’agent public ne paie pas spontanément, l’administration pourra alors récupérer les sommes par l’émission d’un titre exécutoire. Dans ce cas de figure, l’employeur public dispose alors d’un délai de 4 ans pour mettre en œuvre le recouvrement forcé des sommes à payer[4].
L’employeur public a aussi la possibilité, pour obtenir le remboursement des sommes indument perçues, d’opérer un prélèvement direct sur les rémunérations de l’agent public dans le cadre d’une retenue[5] qui ne doit pas dépasser la « portion saisissable »[6].
Le cas échéant, cette décision n’a pas être motivée, il ne s’agit que d’une « mesure purement comptable »[7].
A noter enfin que l’employeur public et l’agent public peuvent convenir, ensemble, de la mise en place d’un échéancier voire d’une remise gracieuse de tout ou partie des sommes dues.
[1] Article 37-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations
[2] Article L711-6 du code général de la fonction publique et article 37-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations
[3] Article 2227 du code civil
[4] Article L274 du livre des procédures fiscales
[5] Articles L3252-1 à L3252-13 et R3252-1 à R3252-49 du code du travail
[6] Article R3252-2 du code du travail