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Autorisation d’exploitation agricole : l’essentiel à savoir

Qui est concerné par l’autorisation d’exploitation agricole ?

Dans certains cas, la création, l’agrandissement d’une exploitation agricole ou la réunion d’exploitations agricoles est soumise à l’obtention d’une autorisation d’exploitation agricole.

L’autorisation d’exploitation agricole relève du « contrôle des structures des exploitations agricoles » et poursuit un objectif principal : « (…) favoriser l’installation d’agriculteurs, y compris ceux engagés dans une démarche d’installation progressive. »[1]

Il s’agira ici de présenter le régime juridique de l’autorisation d’exploitation agricole, notamment au regard des dispositions de l’arrêté du 13 juillet 2022 portant Schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA) en Hauts-de-France.

Peu importe la forme juridique de la structure d’exploitation (GAEC, SCEA, GFA, etc) et peu importe le mode d’exploitation (culture, élevage, production hors sol), le régime de l’autorisation trouve à s’appliquer tant qu’il s’agit d’une activité agricole au sens de l’article L311-1 du CRPM[2].

Quelles sont les opérations nécessitant l’obtention préalable de l’autorisation d’exploitation agricole ?

1. Installation, agrandissement ou réunion d’exploitations agricoles lorsque la surface totale mise en valeur excède le seuil fixé par le SDREA (70 ha pour le Nord et le Pas-de-Calais ; 100 ha pour l’Aisne, l’Oise et la Somme)[3]

2. Installation, agrandissement ou réunion d’exploitations agricoles, quelle que soit la surface totale de mise en valeur, lorsque :

– L’opération supprime une exploitation agricole dont la surface de mise en valeur excède le seuil fixé par le SDREA ou ramène la superficie d’une exploitation agricole en-deçà de ce seuil ;

– L’opération prive une exploitation agricole d’un bâtiment essentiel à son fonctionnement (sauf s’il est reconstruit ou remplacé).

3. Installation, agrandissement ou réunion d’exploitations agricoles au bénéficie d’une exploitation agricole, quelle que soit la surface totale de mise en valeur, lorsque :

– L’un des membres ayant la qualité d’exploitant ne remplit pas les conditions de capacité ou d’expérience professionnelle, telles qui fixées à l’article R331-2 du CRPM.

– Aucun membre n’a la qualité d’exploitant ;

– L’exploitant est un exploitant pluriactif remplissant les conditions de capacité ou d’expérience professionnelle, dont les revenus extra-agricoles excèdent 3.120 fois le montant horaire du SMIC (sauf s’il s’agit d’un exploitant engagé dans un dispositif d’installation progressive).

4. Agrandissement ou réunion d’exploitations pour les biens dont la distance par rapport au siège de l’exploitation du demandeur est supérieure à un maximum fixé par le SDREA (20 km dans les Hauts-de-France)[4].

5. Créations ou extensions de capacité des ateliers de production hors sol au-delà d’un seuil de production fixé par le SDREA (5.000 m² pour les volailles ; 1.000 truies en élevages naisseur et naisseur-engraisseur ; 6.000 places pour les porcs en élevage engraisseur ; 1.000 places pour les lapins ; 1.000 places pour les veaux gras ; 200 ha pour les unités de forçage d’endives et 1 ha pour les serres hors-sols dans les Hauts-de-France).

Par exception : Si les opérations précitées sont soumises à l’obtention d’une autorisation d’exploitation agricole, elles ne seront soumises qu’à une simple procédure déclaration préalable lorsque le bien agricole à mettre en valeur est reçu par donation, location, vente ou succession d’un parent ou allié jusqu’au 3ème degré inclus et que les conditions suivantes sont remplies[5] :

  • L’exploitant déclarant justifie des conditions de capacité ou d’expérience professionnelle, telles que fixées à l’article R331-2 du CRPM ;
  • Les biens sont libres de location ;
  • Les biens sont détenus par un parent ou allié jusqu’au 3ème degré inclus  depuis 9 ans au moins ;
  • Les biens sont destinés à l’installation d’un nouvel agriculteur ou à la consolidation de l’exploitation du déclarant, dès lors que la surface totale de celle-ci après consolidation n’excède pas le seuil de surface fixé par le SDREA (Pour rappel, 70 ha pour le Nord et le Pas-de-Calais ; 100 ha pour l’Aisne, l’Oise et la Somme).

6. Prise de contrôle d’une société possédant ou exploitant des biens immobiliers à usage ou à vocation agricole, réalisée par une personne physique ou morale qui détient déjà directement ou indirectement, en propriété ou en jouissance, des biens de même nature dont la superficie totale excède le seuil d’agrandissement significatif ou qui, une fois réalisée la prise de contrôle, détiendrait une superficie totale excédant ce seuil (En application de l’arrêté du 27 février 2023, le seuil d’agrandissement significatif dans le Nord et le Pas-de-Calais est de 140 ha, il est de 200 ha dans l’Aisne, l’Oise et la Somme)[6].

NB : Tout exploitant envisageant une opération susceptible d’entraîner la modification de la structure d’une exploitation agricole peut demander au Préfet de région, préalablement à cette opération, de lui indiquer si l’opération projetée relève de l’un des régimes, d’autorisation ou de déclaration préalable[7].

Il s’agit de demander à l’administration de prendre formellement position sur le régime applicable. Le cas échéant, cette demande peut être adressée au service chargé du contrôle des structures des exploitations agricoles par tout moyen.

Dès réception de la demande, le Préfet de région dispose d’un délai de 3 mois pour se prononcer[8].

Quel est l’intérêt de demander à l’administration de prendre formellement position sur le régime applicable ?

Lorsque l’administration a pris formellement position sur le régime applicable, elle ne peut plus adopter, à l’avenir, une position différente sur la demande, sauf changement de réglementation ou transmission d’informations erronées par le demandeur[9].

Qui délivre l’autorisation d’exploitation agricole ?

L’autorisation d’exploiter est délivrée par le Préfet de région où se trouvent les biens dont l’exploitation est envisagée, avec l’appui du Préfet du département du siège de l’exploitation[10].

De combien de temps le Préfet dispose-t-il pour instruire la demande d’autorisation d’exploitation agricole ?

Le Préfet dispose d’un délai de 4 mois à compter de la date d’enregistrement du dossier complet.

Par décision motivée, il peut fixer ce délai à 6 mois.

Une fois la décision rendue, le Préfet doit la notifier aux demandeurs, aux propriétaires et aux preneurs en place par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise contre récépissé[11].

Et si le Préfet ne notifie aucune décision dans le délai qui lui est imparti ?

A défaut de notification d’une décision dans le délai de 4 ou 6 mois, l’autorisation est réputée être accordée.[12]

Le Préfet peut-il refuser de délivrer l’autorisation d’exploitation agricole ?

OUI : L’autorisation peut être refusée par le Préfet pour plusieurs raisons[13] :

  • Lorsqu’il existe un candidat à la reprise ou un preneur en place répondant à un rang de priorité supérieur au regard du SRDEA (Celui des Hauts-de-France fixe 6 rangs et, en cas de demandes relevant d’un même rang, la priorité est donnée aux jeunes agriculteurs ou nouveaux installés s’ils justifient de la réalisation d’un projet viable)[14] ;
  • Lorsque l’opération compromet la viabilité de l’exploitation du preneur en place ;
  • Lorsque l’opération conduit à un agrandissement ou à une concentration d’exploitations au bénéfice d’une même personne excessifs au regard des critères fixés par le SRDEA (opération conduisant au dépassement d’un seuil de 140 ha/unité de travail annuel dans le Nord et le Pas-de-Calais ou 200 ha/unité de travail annuel dans l’Aisne, l’Oise et la Somme ; opération conduisant au dépassement d’un seuil de 500 ha exploités)[15], sauf s’il n’y a pas d’autre candidat à la reprise de l’exploitation ou du bien considéré, ni de preneur en place ;
  • Lorsque la  mise à disposition de terres à une société entraîne une réduction du nombre d’emplois salariés ou non salariés, permanents ou saisonniers, sur les exploitations concernées.

Le Préfet peut-il suspendre l’instruction de la demande ?

OUI : Le Préfet peut suspendre l’instruction de la demande pour une durée de 8 mois, après avis de la commission départementale d’orientation de l’agriculture si l’opération conduit à un agrandissement ou à une concentration d’exploitations au bénéfice d’une même personne excessifs au regard des critères du SRDEA, le temps qu’un autre candidat à la reprise de l’exploitation ou du bien considéré ou un autre preneur en place dépose une demande d’autorisation d’exploiter[16].

L’autorisation d’exploitation agricole a-t-elle une date de péremption ?

OUI : L’autorisation est périmée si le fonds n’a pas été mis en culture avant l’expiration de l’année culturale qui suit la date de sa notification[17].

La décision par laquelle le Préfet de région refuse de délivrer l’autorisation d’exploiter est-elle contestable ?

OUI : La décision par laquelle le Préfet de région refuse de délivrer l’autorisation d’exploiter contestable devant le Tribunal administratif compétent, dans un délai de 2 mois suivant sa notification à l’exploitant.

Que se passe-t-il en cas d’exploitation sans obtention préalable de l’autorisation d’exploiter ?

Lorsque le Préfet de région constate qu’un fonds est exploité sans autorisation alors qu’elle était nécessaire, il met l’intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qui ne peut être inférieur à un mois.

Le cas échéant, en fonction des situations, la mise en demeure précise :

  • Si une demande d’autorisation d’exploiter doit être présentée ;
  • Que les terres doivent cesser d’être exploitées lorsqu’une décision de refus d’autorisation est intervenue.

Lorsque l’intéressé est mis en demeure de cesser l’exploitation des terres, il est invité à faire part de ses observations[18].

Et si l’exploitation des terres se poursuit malgré la mise en demeure ?

Si le Préfet de région constate que l’exploitation se poursuit dans des conditions irrégulières (absence d’autorisation, non-respect de la mise en demeure de cesser l’exploitation), il peut prononcer une sanction pécuniaire comprise entre 304,90 € et 914,70 € par hectare exploité, tant que l’exploitation n’a pas cessé[19].

La sanction pécuniaire est-elle contestable ?

OUI : La décision par laquelle le Préfet de région inflige une sanction pécuniaire peut être contestée dans un délai d’un mois suivant sa notification, devant la commission des recours instituée à échelle régionale.

L’exploitant sanctionné et le Préfet de région y présentent leurs observations contradictoirement[20].

Dans quel délai la commission des recours statue-t-elle ?

La commission des recours notifie une décision dans un délai de 6 mois à compter de sa saisine.

Si elle valide la sanction, le Préfet de région pourra émettre un titre exécutoire en vue du recouvrement des sommes[21].

La décision de la commission des recours est-elle contestable ?

OUI : La décision de la commission des recours peut être contestée devant le Tribunal administratif compétent dans un délai de 2 mois suivant notification, tant par l’exploitant lui-même que par le Préfet de région[22].

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[1] Art. L331-1 du CRPM

[2] Art. L331-1-1 du CRPM

[3] Art. 4-1 de l’arrêté du 13 juillet 2022 portant SDREA en Hauts-de-France

[4] Art. 4-2 de l’arrêté du 13 juillet 2022 portant SDREA en Hauts-de-France

[5] Art. L331-2, II du CRPM

[6] Art. L333-2 du CRPM tel que modifié par la loi n° 2021-1756 du 23 décembre 2021 dite « Sempastous »

[7] Art. L331-4-1 du CRPM

[8] Art. R331-16 du CRPM

[9] Art. L331-4-2 du CRPM

[10] Art. R331-3 du CRPM

[11] Art. R331-6 du CRPM

[12] Ibid.

[13] Art. L331-3-1 du CRPM

[14] Art. 3 de l’arrêté du 13 juillet 2022 portant SDREA en Hauts-de-France

[15] Art. 5, d) de l’arrêté du 13 juillet 2022 portant SDREA en Hauts-de-France

[16] Art. L331-3-1 du CRPM

[17] Art. L331-4 du CRPM

[18] Art. L331-7 du CRPM

[19] Ibid.

[20] Arts. R331-9 à R331-11 du CRPM

[21] Art. R331-12 du CRPM

[22] Ibid.

Article écrit par Me Chloé Schmidt-Sarels

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